B/Free/Bifteck

Etienne Brunet:

B/Free/Bifteck

Recorded in 1998

Etienne Brunet soprano & alto saxophones, bass clarinet, harmonica, sanza, plus:


Daunik Lazro alto & baryton saxophones (1*) Daniel Mille accordion (1*) Thierry Madiot trombone & bass trombone (1*) Erick "Funka" Borelva drums (1*) Hubert Dupont double bass (1**) Camel Zekri guitar (1**) Fred van Hove church organ (2)

Special guests: Julien Blaine voice (1, 10) Thierry Negro electric bass (3-10)

Ind. Title Composer / Author Dur.
1/ B/Free/Bifteck Brunet, Mille, Lazro, Madiot, Zekri, Dupont, Borelva 15:03
2/ C/Free/ Bifteck/Fantôme Etienne Brunet, Fred van Hove 20:09
3-9/ Seven Jungle Ladies Etienne Brunet, Thierry Negro 15:06
10/ Contamination Nation E. Brunet + sampling Braff, Lacy & Parker / E. Brunet 2:45

Recorded live at the Bimbo Tower / Bastille, Paris on Oct. 96 & Jan. 97 (1*); at the Miroir de Ménilmontant, Paris, on March - April 97 (1**); at the Église Saint-Germain des Prés, Paris, on June 97 (2). Engineer: Patrick Muller.

Tracks 1-2 superimposed and mixed by Etienne Brunet & Patrick Muller at Studio de Ventabren (France) on July 97. Tracks 3-10 sampled by Etienne Brunet and mixed by Patrick Muller at Studio La Rotonde, Chatenay-Malabry (France).
Mastered at Studio La Source, Paris (France). Engineer: Jean-Pierre Chalbos.

Producer: Benjamin Barouh.

Cover photographies: Akiko. Cover art: Phong Luong Dien.

À propos de "Contamination Nation"

J'avais écrit les paroles d'une chanson en hommage à James Brockington, un chanteur de jazz et un ami américain avec qui j'avais un peu joué. Sa disparition m'a bouleversé : c'est la seule personne de mon entourage morte du SIDA. Il menait une vie de Bohême entre les États-Unis et l'Europe. Il dérivait entre la France et l'Allemagne. C'était un spécialiste de Gershwin et de Cole Porter. Il n'aimait pas du tout la free music ni aucune musique jouée après Ellington.

Je ne me souviens plus du tout pourquoi j'avais choisi la structure de I Can't Get Started pour écrire cette chanson, si ce n'est le titre ! Il me semblait avoir entendu dire que Lacy utilisait cette chanson dite "standart" dans son fameux Cryptosphere sur Lapis. Je n'avais pas encore entendu ce disque, déjà mythique et trop rare (j'ai eu par la suite l'honneur de le rééditer pour Saravah). Évidemment, ce n'est pas ce standart que Steve avait utilisé !

Un chanteur de (vrai) jazz à qui j'ai proposé mon texte s'est défilé, horrifié. Le temps a passé... Il me faut souvent des années avant d'avoir la chance d'enregistrer un malheureux morceau. C'est à Julien Blaine, grand poète devant l'Éternel absolu, chez qui j'ai mixé B/Free/Bifteck, que j'ai proposé à nouveau mon texte. Sans aucune hésitation, il a accepté, tout de suite. Il a même ajouté quelques citations de John Giorno (pour les connaisseurs !).

 L'idée de cette pièce repose sur la notion de superposition et de contamination, concept mis en oeuvre dans l'ensemble de l'album B/Free/Bifteck. Pourquoi ne pas continuer la chaîne, débutée par Lacy (qui a joué sur un morceau de Ruby Braff), suivie par Evan Parker (qui a superposé sa voix à "Cryptosphere" dans son album Process and Reality) ?

Cette sorte de métaphore poétique m'a semblé évidente. J'ai longuement hésité, de peur que les artistes cités prennent ombrage de ma démarche. Je dansais d'un pied sur l'autre avec cette pièce de "gonzo music"/"danger music" intitulée Contamination Nation, oeuvre d'une demi-portion de jazzman perdu dans l'indifférence binaire de la société marchande...

Je sais aussi que James n'aurait sans doute pas aimé cet hommage destructuré et brisé ; le rythme, la mélodie et l'harmonie de I Can't Get Started sont totalement dissous, dans l'oubli et la mort.

Finalement j'ai décidé de l'utiliser comme "bonus track".

Etienne Brunet (communication personnelle - Paris, 20/08/98)

Liner Notes

B/Free/Bifteck est virtuellement une tentative de reconstruction en studio de l'énergie des années soixante-dix. La dialectique de cette musique, dans la nuit télé-surveillée où toutes les vaches sont grises, se compose et se décompose à partir d'enregistrements de sept duos de musique improvisée superposés en studio. J'ai choisi ce mixage parmi des milliards de combinaisons possibles. Le mixage est une sorte de métier à métisser, comme un bonheur rêvé. C'est le but final de ce disque.

La réalisation de cette musique illustre l'indécision du temps technologique et la peur du lendemain. On est optimiste de se réveiller, chaque jour bien vivant. J'ai entendu cette résonance en Haute-Provence à l'aube vers cinq heures du matin. Des centaines d'oiseaux, de chiens, de vaches, de moutons, de grenouilles et autres animaux et insectes se manifestent simultanément pour saluer le retour de la lumière. Un jour nouveau débute. Chaque chant est intéressant individuellement. Une harmonie très particulière et très libre se crée lorsqu'ils sont tous réunis. C'est le prélude à la matinée d'un faune peut-être prochainement transformé en bifteck dans les failles de la chaîne agroalimentaire. L'impossible mélodie du bonheur.

L'oeuvre est divisée en trois mouvements principaux. B/Free/Bifteck symbolise l'éveil de la nature au point du jour entendu par un habitant des villes. C/Free/Bifteck/Fantôme évoque l'inquiétude du jour présent dans la tension permanente du marché libre. Le spectre du passé nous hante encore et toujours. Seven Jungle Ladies est une métaphore du conditionnement de la musique coupée en tranches comme un corps animal échantillonné. Contamination Nation est le bonus track évoquant la maladie et la mort dans le vrai style XXe siècle. Construit sur le principe de l'épidémie, j'utilise Lapidary d'Evan Parker qui était déjà superposé à Cryptosphere de Steve Lacy lui-même superposé à un disque de Ruby Braff. Le texte emprunte à Julien Blaine et John Giorno.


B/Free/Bifteck is a virtual in studio attempt to recapture the energy of the seventies. This music's dialectic in the video-crime night-watch where every cow is gray, is composed and decomposed from recordings of seven duos of improvised music layered together in a final studio mix. I chose the mix, a choice among billions of possible combinations, because the mix is a sort of loom, the mix is the dreamt joy of this record, the mix is its final goal.

The making of this music pictures the indecision of techno-time and the fear of tomorrow. We are optimistic just from waking up alive each day. I heard this resonance at dawn in the Haute Provence at about five in the morning. Hundreds of birds, dogs, cows, sheep, frogs and other animals and insects all simultaneously greet the returning light. A new day begins. Each song is interesting individually. A very peculiar and very free harmony is created by their reunion. It's the prelude to a faun's matinee maybe soon to be turned into beefsteack in the rifts of the food chain. The impossible melody of joy.

The piece is divided into three main parts. B/Free/Bifteck symbolizes the awakening of nature at the break of day as heard by a city-dweller. C/Free/Bifteck/Fanôme conjures today's anguish in the permanent tension of the free market. The ghosts of the past are forever haunting us. Seven Jungle Ladies is a metaphor of the conditioning of music cut into slices like a sampled animal body. Contamination Nation is a bonus track evoking death and disease in the real 20th century style. Built on the principles of an epidemic. It uses Lapidary by Evan Parker which already uses Steve Lacy's Cryptosphere itself superimposed onto a Ruby Braff record. The lyrics borrow from Julien Blaine and John Giorno.

Etienne Brunet (excerpt from liner notes - translated into English by Lari Lucien)

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